NE PAS BOUGER
Il y a sa fatigue, son corps souffrant qui l'empêche d'avancer.
Il y a aussi le désir d'aller de l'avant.
Et par dessus tout, la peur de ne pas y arriver. Avec si peu d'énergie!!!
Quelle profonde désespérance. Un être vient nous en parler. Tout petit, impuissant. Il est prostré, immobile dans le noir. Incapable de bouger. Tout près de lui, un trou. Sans fin. S'il bougeait, il pourrait tomber. Terreur absolue. surtout, ne pas bouger. Ne rien faire.
Peu à peu émerge la curieuse sensation de l'envie d'aller dans le trou. Comme si aller là dedans permettrait de vivre enfin, ailleurs. Comme si aller là dedans était une condamnation à disparaître, ici . Cependant, la peur est trop forte.
Ne pas bouger. Ne rien faire.
Cette peur immense qui est là l'accompagne depuis longtemps. Depuis toujours. De puis l'enfance, et même avant…
Alors, l'attention se pose vers l'enfant à naître qu'il était. Il nous raconte la même histoire. Sortir et ne pas sortir. Cette fois, il ose sortir et là, rien! Personne! Personne pour l'accueillir.
Et bien si, nous sommes là. Pas pour accueillir cet être. Juste pour être les témoins de cet immense besoin d'accueil qui n'a pas été entendu. Il y a besoin de reconnaître longuement la présence de ce besoin. C'est seulement ensuite que cet être acceptera de se laisser accueillir à la mesure de son besoin.
Pour nous aussi, ne pas bouger. Ne rien faire.
Le message de l'être qui craignait tomber dans le trou et tout à la fois souhaitait y plonger s'éclaire :
Ne pas bouger.Ne rien faire ...
Juste être avec.
La rencontre s'opère. Nouvelle.Fragile et puissante.
(Après la séance il me raconte sa naissance: Sa mère a eu un problème au moment où il est venu au monde. Toute l'attention des personnels présents s'est portée sur elle, et lui, il est né dans l' “indifférence”. Tout le monde était affairé. Personne n'était là pour l'accueillir. Comme si personne ne l'attendait. On comprend alors combien il peut être important de ne rien faire!)
(Photo D. ROQUES)