L'ACCOMPAGNEMENT / LE GUIDAGE NON DIRECTIF

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On ne peut accompagner quelqu'un que dans la mesure de ce qu'il exprime .

Les mots

Exprimer, étymologiquement, c'est presser, exercer une pression pour faire sortir. Quand on "exprime le suc d'un fruit", c'est cette idée.

Au sens figuré, le mot en en venu à signifier qu'on fait sortir une représentation de ce qui est en soi pour le faire connaître, notamment par le langage. Ce qui est exprimé part à la rencontre d'un destinataire. Ca peut être un public nombreux ou réduit à une seule personne, voire même imaginaire . On peut aussi être son propre public, lorsqu'on parle tout seul ou qu'on écrit .

Le langage utilisé peut-être varié

  • les mots (parlés, écrits, chantés, criés …)
  • toute forme artistique
  • le non verbal
  • Accompagnement - guidage
    Accompagner, c'est se déplacer avec quelqu'un, pour le protéger ou juste pour être son compagnon;
  • Guider contient aussi l'idée de déplacement. Le guide sait où il va, il montre la direction.

Or, cet accompagnement sera "non-directif".  C'est là qu'est la nuance fondamentale.

Dans l'accompagnement non-directif, le guide ne sait pas où il va! Il est plutôt le compagnon (celui qui accompagne) attentif et attentionné, il découvre la route au fur et à mesure qu'elle se déroule sous les pas.

 

Qu'exprimer?

Dire à autrui fait partie des besoins essentiels. Attend-on en retour d'être entendu? Compris? Certainement accueilli. Ne pas avoir accès à cette qualité d'écoute génère de la frustration. La validation, la reconnaissance d'un vécu, d'un ressenti sont des éléments capitaux d'une écoute thérapeutique


Qui s'exprime?

Il y a celui qui parle, aujourd'hui. Et il n'est pas seul …

La persone qui parle évoque son ressenti. Enfin …. elle évoque le ressenti qu'elle éprouve et qu'elle vit comme étant le sien, en réponse au stimulus actuel. Il ne faut pas oublier que tous ceux qu'elle a été, et qui ont parfois vecu des choses terribles, sont là, auprès d'elle avec un besoin d'attention, de reconnaissance. Chacun éclaire le vécu du jour avec sa couleur propre, ou peut-être même s'exprime directement à la place du sujet présent dans la situation, par delà le discours visible. Ils colorent le réel à coup de symptômes qui sont autant de signaux pour qui sait les entendre. C'est par exemple le cas des situations où "on ne peut pas s'empêcher de …" où "on ne sait pas ce qui nous a pris" alors qu'on sait bien qu'on préfèrerait faire autrement, être libre au lieu d'être pris.

 

Qui écoute? Comment?

Celui qui écoute doit être attentionné.

Pour comprendre (cum-prendre =prendre avec) il doit pouvoir tout prendre, tout entendre. L'explicite et l'implicite; le verbal et le non verbal, le dit et le non-dit sans l'interpréter, sans projeter ses propres représentations sur ce qu'il pressent. Entendre ce qu'il y a dans ce qui est dit, et au delà, sans y mettre de soi, sans en influencer ni en altérer l'expression, tel est le défi que doit relever le guidage non-directif.

Celui qui écoute valide et reconnaît le vécu. Valider, c'est donner de la valeur, de l'existence à ce qui est là. C'est lui donner le droit d'exister complètement; il en résulte de l'apaisement. Tenter d'apaiser revient à vouloir changer ce qui est ressenti (" ce n'est pas si grave" ;"tu pourrais le voir autrement"). Cette non-reconnaissance de ce qui est (et qui se voudrait bienveillante) ne parvient qu'à générer de la frustration.


La rencontre

Ecoutant et écouté: deux univers qui se rencontrent! Ils emploient des mots identiques et pourtant, chacun des deux est là accompagné de tous ceux qu'il a été, qui colorent, qui influencent qui codent tet décodent ce qui circule dans l'échange. On voit là que ce comprend l'un peut ne pas être forcément tout à fait ce que souhaite exprimer l'autre. Ce qui est enfoui chez la personne écoutée a besoin de temps et de confiance pour émerger. L'aidant ne peut qu'accompagner que ce qui se produit déjà: le patient a seul les clés de chez lui.

La notion de "directivité" est parfaitement hors de propos dans un tel contexte. Le thérapeute peut certainement guider l'autre dans son propre univers, qu'il connait à peu près, mais certainement pas dans celui de son interlocuteur, pour la simple raison qu'il lui iest inconnu. Et celà, le thérapeute le sait!. C'est d'alleurs à peut près tout ce qu'il sait.

Au lieu d'attirer l'autre dans des contrées qui ne sont pas les siennes, le thérapeute va se laisser toucher par ce qui lui est donné à voir, sans crainte d'être envahi ou de s'y perdre.


Le guidage

Ce guidage autorisera l'autre à aller au plus juste de l'expression de son ressenti, verbale, certes, mais aussi sensible.

  • Il permettra une chaleureuse rencontre avec soi-même, avec l'être de soi qui s'exprime à cet instant.
  • Il permet à la personne écoutée de se découvrir elle-même, en des endroits jusque là méconnus d'elle.
  • Il sera respectueux de la vitesse, de la profondeur, du degré de précision, des élans et ds refus, des mots ou des silences de celui qui s'exprime.
  • Il considèrera que ce qui advient est le plus juste pour celui qui parle.
  • Il sera confiant dans l'autre
    • Paradoxalement, le guide accepte d'être guidé car l'autre sait mieux que lui (même s'il n'en a pas la conscience claire de ce qui se passe, il est un expert concernant son propre éprouvé)
    • Confiance également dans ce qu'on va trouver: en cours de route, il n'y a pas d'horreurs, mais juste les êtres qui les ont vécues, et qui osent se montrer enfin dans leur vulnérabilité. Leur besoin d'être rencontrés devient un véritable trésor.
  • Il sera invitation et jamais imposition

L'autre est valorisé inconditionnellement. Il est accueilli dans ce qu'il est et dans l'acceptation qu'il n'a pas à changer. Se sentant acceptée et reconnue, la personne peut enfin s'accepter et se reconnaître dans toutes ses parts d'ombre qu'elle découvre et dont elle peut enfin percevoir la justesse.

Dans ce guidage, il y a un contact psychique, d'être à être, entre celui qui s'exprime et le thérapeute (qui est aussi parfois le patient lui-même, se rendant compte de ce qui émerge) qui l'écoute .

Non-directivité et influence

Le guidage non-directif se défend d'influencer le personne écoutée!

Dans influence, il y a la notion de fluence (écoulement fluide du flux).
Influencer quelqu'un, c'est l'amener dans son propre flux.

Sitôt qu'il ya interaction, il y a influence: le cours de chacun se trouve infléchi (sinon, être seul ou accompagné serait la même chose).

L'accommpagnement non-directif sera influençant au premier sens énoncé plus haut: il va permettre à la personne de voir et de rejoindre son propre flux. Le propre flux de la personne sera celui qui est juste pour elle, pour les êtres qui sont là. Cette justesse là ne se décrète pas de l'extérieur. Qui donc peut l'éprouver hormis la personne elle-même?

L'art du guidage non-directif sera de guider la personne vers une direction qu'elle est seule à connaître.(Rappelons que le patient est un expert dans son vécu et ses ressentis.)

En résumé

L'ESPACE D'ECOUTE repose sur 4 piliers

  • Etre bienveillant

Chaleureux, sans jugement.Une écoute inconditionnellement accueillante qui se considère privilégiée de la confiane qui lui est accordée

  • Etre individualisé

Ne pas se mettre à la place de l'autre. ni savoir pour lui, ni interpréter, ni induire

  • Avoir confiance

En celui qu'on écoute plus qu'en sa technique; dans le fait que ce qui est là a une raison d'ête puissante

  • Faire passer l'état d'esprit avant l'action

La sensibilité plus que l'intellect. l'Etre au lieu du faire. L'individu plus que le problème. Il n'y a pas de problème à résoudre, mais un projet noble de réhabilitation à respecter


photo Dominique ROQUES